New Mouttahed coach, Jean Denis Choulet’s opinion about Lebanon, the Lebanese people, Lebanese basketball and his club!
Jean-Denys Choulet : «Ils veulent des mecs à 30 points»
Par Jérémy Barbier le mar, 09/10/2012 - 15:16
Jean-Denys Choulet se plaît au Liban (Agenzia Ciamillo-Castoria/M.Gregolin)
En pleine phase de préparation avec son club d’El Mouttahed Tripoli, Jean-Denys Choulet continue de prendre ses marques au Liban. L’ex-coach de Roanne nous a longuement parlé de son nouveau quotidien.
La préparation avec ton club a commencé il y a seulement quelques jours. Tout se passe bien jusqu’à présent ?
On est en plein dedans, ça commence à tourner. On est toujours à la recherche d’un joueur en poste 2/1, un combo. (ndlr : entretien réalisé la semaine dernière) J’avais un contact presque finalisé avec J.R Reynolds mais il a décliné l’offre au dernier moment parce qu’il avait peur de la situation au Liban. Honnêtement, les médias font bien du mal à ce niveau. Je suis ici depuis quelques semaines, il n’y a absolument rien, tout est tranquille. Je dirais que c’est presque moins dangereux que d’habiter dans certains quartiers chauds de Marseille, Paris ou Lyon. Les médias font énormément de mal. Je ne suis pas dans le coin le plus facile car Tripoli est l’une des villes les plus pauvres mais ça se passe tout à fait bien. Les gens sont charmants, d’une gentillesse que je n’avais pas vue en France depuis de très longues années.
La perception que les gens peuvent avoir de ce pays, ça perturbe le recrutement ?
Oui, ça joue. Quand tu regardes CNN et compagnie, effectivement, tu peux prendre peur. Mais je te jure, ma femme est restée avec moi quelques semaines, elle était parfaitement tranquille à la plage tous les jours. Jusqu’à aujourd’hui, touchons du bois, il n’y a aucun souci.
Tu as l’air d’avoir trouvé tes marques. Tu es déjà bien installé ici ?
Tu peux aller sur Facebook, tu verras. (Il rit) On est installé dans un truc… Franchement, il n’y a pas d’équivalent en France. On est dans une station très privilégiée où tout est privé : l’électricité, la plage, la piscine. C’est un duplex avec vue sur la mer et la marina, c’est franchement exceptionnel. Ceci dit, quand tu sors de là, le reste est loin d’être exceptionnel. C’est extrêmement pauvre. Par contre, concernant les restaurants par exemple, tu trouves tout ce qui est Américain : Pizza Hut, Burger King… Les Libanais parlent trois langues : français, arabe et anglais. C’est très facile pour les Ricains. Ils ont peur d’y venir mais quand ils y sont, ils se sentent comme chez eux.
Au niveau des structures, quelle est la situation de ton club ?
Je ne connais pas les autres clubs mais nous, c’est assez professionnel. Le gymnase est tout petit, comme le gymnase du Coteau à Roanne donc il y a très peu de spectateurs. Mais tous les matches sont télévisés en direct. C’est un gros plus. Les gens ne peuvent pas entrer dans la salle mais ils regardent la télé. Et en cas de victoire, tout le monde fait la fête dehors… Le Ministre des Finances est l’oncle du président du club. Il a fait un centre culturel avec aussi une académie de basket où il y a 300 gamins. Ils attachent ici beaucoup d’importance à la réussite pour le renom de Tripoli. Entre Beyrouth et Tripoli, c’est la guerre. Beyrouth considère Tripoli comme des moins que rien donc Tripoli veut se mettre en avant par d’autres choses, notamment le sport, pour montrer qu’ils existent.
Les confrontations vont êtes bouillantes ?
Ah oui, ça va être chaud. Mais ça, ça ne me dérange pas.
"J'ESSAIE DE MONTRER QU'ON PEUT JOUER AVEC LES LIBANAIS"
Et au niveau de ton staff, ça se passe comment ?
On a la chance d’avoir un kiné exceptionnel. Ça fait vingt ans que je suis dans le haut-niveau, je n’ai jamais vu un kiné aussi fort que lui. Les joueurs qui se font une entorse reprennent deux jours après. Il a un talent incroyable. Je crois même que c’est plus que du talent. On a un GM, nous sommes un des seuls clubs du Liban dans ce cas. Après, au niveau de l’organisation en générale, c’est comme la France quelques années en arrière.
Tu as un assistant local ?
(Ndlr : le jour de notre interview, Jean-Denys devait accueillir un assistant égyptien) J’ai essayé de recruter un assistant en France, j’ai écrit un mot au syndicat, je n’ai pas eu de réponse. Je voulais un assistant français de préférence célibataire parce que c’est plus facile ici quand tu es sans femme et sans enfants. Ils étaient prêts à lui donner 2300 dollars par mois, logement, voiture, billets d’avions, c’est quand même pas mal ! Mais je n’ai eu aucune réponse, j’ai trouvé ça bizarre. Moi, j’aurais pu rester confortablement au chômage en France. J’ai passé 50 ans donc j’ai le droit à trois ans de chômage plein pot. J’ai préféré partir ici car je ne voulais pas attendre qu’un coach se casse la gueule. J’ai préféré venir ici. J’espère rebondir rapidement en France la saison prochaine, il n’y a pas de raison que ça ne se fasse pas.
Cette expérience au Liban est aussi l’occasion pour toi de refaire équipe avec Marc Salyers. Quel joueur as-tu retrouvé ?
J’ai à peu près retrouvé le joueur que j’avais à Roanne. Marc, il faut le connaître, savoir l’utiliser sur les systèmes de jeu. C’est un quatre qui joue un peu comme un trois. C’est quelqu’un pour qui il faut mettre des systèmes en place, notamment beaucoup d’écrans pour qu’il puisse tirer. Ici, ils veulent des mecs à 30 points par match, les étrangers ont le rôle majeur. Si tu veux, les Libanais sont les porteurs d’eau et les étrangers mettent des points. J’essaie de montrer qu’on peut jouer avec les Libanais et qu’ils peuvent être efficaces et marquer des points. J’ai des bons Libanais, notamment Rony Fahed. J’ai Samaha Roy qui avait fait un essai au P.L, un big man qui n’est pas mal non plus. J’ai des joueurs libanais qui ont largement le niveau pour jouer en Pro A. Pas dans le top mais j’ai l’équivalent de Philippe Braud en shooteur, j’ai Rony Fahed qui est l’équivalent de beaucoup de joueurs français. Le niveau est bon au Liban, contrairement à ce qu’on pourrait croire.
Au niveau du coaching, tu sens que cette expérience va t’apporter des choses ?
Je ne sais pas encore quoi mais oui, ça va m’apporter car c’est vraiment un dépaysement total. Il faut composer avec des tas de choses, ça permet de retrouver un peu les bases et tout le travail que ça comporte. C’est un peu le travail que j’ai fait en arrivant à Roanne : mettre le nez partout, s’occuper un peu de tout. Il faut faire les fondamentaux car les joueurs libanais ne sont des princes de la défense. Il faut revoir toutes les bases défensives.
En vue du plus long terme et des recrutements que tu devras faire, cette saison peut-elle te servir de grande séance de scouting ?
Pas sûr. Ca dépend où je signe. Si je signe dans un club de haut de tableau en Pro A, ça ne me servira pas. Dans un club moyen, ça pourrait, peut-être au moins sur les Ricains. Sur les joueurs libanais, quelques-uns pourraient jouer mais ils sont considérés comme étrangers et pour ce statut en France, c’est léger.
Pour prendre un peu de recul suite à la saison dernière, tu avais besoin de ce genre d’expérience ?
J’avais surtout besoin de travailler…J’ai toujours eu la réputation de quelqu’un de difficile mais si j’étais si difficile que ça, je ne serais pas resté douze ans à Roanne. En plus, il y a des choses que je ne comprends plus en France. Ça ne sert à rien de faire du boulot, d’être dans le Top 5 pendant 5 ans, d’être champion de France avec le 14ème budget, de faire l’Euroleague. Je ne comprends pas tout ça. Moi, je suis décidé à rebondir le plus vite possible dans un club de bon niveau car je n’ai rien perdu de ce que je savais faire et je suis toujours aussi motivé et passionné par ce sport.
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